Page:Blanc - L’Organisation du travail.djvu/62

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
56
ORGANISATION

Non, rien n’est comparable à la cruauté de l’emprisonnement cellulaire. Une fois plongé vivant dans ce tombeau qu’on appelle une cellule, le condamné ne tient plus à l’humanité que par son désespoir. Pas de témoins pour son martyre, d’écho pour ses gémissements. Sa solitude, quatre murs glacés la contiennent et la resserrent. Tout lui manque à la fois : la vue des hommes et le spectacle des vastes cieux, les bruits de la terre et les harmonies de la nature. L’éternité du silence pèse sur lui. L’oubli l’enveloppe. Il respire et s’agite dans la mort.

Que la dernière loi votée ait adouci ce qu’aurait de barbare la logique d’un semblable châtiment, nous sommes heureux de le reconnaître, et nous bénissons du fond de l’âme les dispositions qui ménagent au condamné l’espérance de voir passer quelquefois devant lui un visage humain. Et cependant, combien est dure la loi, même ainsi conçue !

Mais nos législateurs ont eu foi, chose inconcevable ! dans le caractère moralisateur de l’emprisonnement cellulaire, et c’est ce qui, à leurs yeux, en a masqué l’horreur. Ils ont cru, par un aveuglement dont il y a peu d’exemples, que l’homme pouvait s’élever au sentiment de ses devoirs envers ses semblables, à force de vivre séparé d’eux ; qu’il était possible de réformer et d’éclairer les instincts de la sociabilité dans le coupable,