Page:Blanc de Saint-Bonnet - La douleur, Maison de la bonne presse, 1911.djvu/192

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croître l’idée comme la plus forte pensée de l’homme ? Vivre pour souffrir, pour me désespérer, peut-être pour me perdre moi-même ?..... je ne cherchais pas à naître. Créer pour voir naître le mal, et, par une ironie cruelle, charger l’être lui-même de se multiplier dans le malheur ! Quel instinct agit donc à la source des choses ? Et que doit être cette Source en elle-même ? Ne produire que pour détruire ! Détruire, quel mot ! Et quelle tache sur la création, la mort !..... Moi qui vis, où peut être maintenant mon désir de vivre ? Dieu, si tu es, tu peux rendre l’homme heureux ; pourquoi ne le fais-tu donc pas ?..... On ne saurait échapper à cette pensée : Si tu es bon, pourquoi le malheur est-il ? Ne pouvons-nous rentrer tous dans les retraites du néant ? Propager le genre humain, n’est-ce pas propager la mort et reculer les rivages de la douleur ? Vois ! le fleuve immense de la vie ne fait que charrier mal sur mal ; sous chaque toit coule une larme qui en grossit à tout instant le cours..... Si du moins l’homme pouvait se retirer du défilé obscur de l’existence ! Mais ton imprévoyance