Page:Blanc de Saint-Bonnet - La douleur, Maison de la bonne presse, 1911.djvu/30

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Le déclassement intellectuel amené par la Révolution a aussi augmenté sans mesure la masse des douleurs. Nous ne parlons pas ici des multitudes sous lesquelles l’abus de l’industrie ouvre le gouffre du paupérisme, mais bien des individus sans nombre chez qui des lectures intempestives enflent l’imagination et produisent un développement tout factice du cœur. Les fortunes rapides, ici fournies par l’extension du commerce, là par l’agiotage même, ont tout à coup multiplié les familles où une instruction trop légère, suivie de la lecture des romans, déploie la sensibilité aux dépens de la volonté et du caractère. Autrefois, les familles qui avaient part à l’instruction littéraire comptaient pour ancêtres des hommes formés, soit par la rude vie des champs, soit par la vie non moins âpre des camps. Il circulait dans ces lignées un esprit de vaillance qui relevait les cœurs. Il en sortait des races plus aptes à porter l’accroissement de sensibilité et d’imagination dont l’instruction devient souvent la source malheureuse. Comment les âmes écloses dans la tiède atmosphère de nos villes, et tristement réduites à la recherche du bien-être, seraient-elles capables de porter maintenant tout le poids de la vie, et d’habiter parmi des hommes