Page:Blanc de Saint-Bonnet - La douleur, Maison de la bonne presse, 1911.djvu/55

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Quelquefois elle vide entièrement l’âme, mais lorsqu’elle a passé, Dieu s’y précipite pour la remplir. Les joies du ciel descendraient-elles avec leur suavité dans toute l’âme humaine, si l’amertume de la douleur n’y avait partout éveillé une faim sacrée ? La joie se fait sa place quand le cœur s’agrandit ; c’est dans le vase de la douleur que se répandra la Félicité.

Cependant si l’on ne savait pas à cette heure que dans la Chute est l’origine de la douleur, que dirait-on à ceux qui en sont atteints ! Que dirait-on surtout à ceux qui voient tomber autour d’eux des personnes chéries ? Sans la Chute, la douleur resterait un mystère foudroyant pour la pensée. Mais la douleur n’est plus la douleur, elle est la résurrection et la gloire !

Cette vie est courte, très courte ; plus courts encore sont les événements qui la remplissent : on ne le sent réellement qu’au terme. Alors on ne regrette plus les palmes qu’on a cueillies dans le buisson ardent : un rayon d’amour luit, et nous ressentons un regret mortel de n’avoir pas à donner à Dieu une seconde vie mille fois plus