Page:Blanc de Saint-Bonnet - La douleur, Maison de la bonne presse, 1911.djvu/83

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Pour aimer, il s’arrache deux fois à lui-même.

(Dans la plus humble position, il peut y avoir des héros !)

Et de la sorte se fait l’homme. Son corps de plus en plus l’accable ; l’amour d’autrui de plus en plus s’éloigne. Tous les jours la lutte grandit, comme la volonté ; tous les jours le sacrifice augmente, comme le cœur. À tous les pas, on voit le sentier plus abrupt, et le sommet que l’on gravit plus dépouillé..... Ainsi l’existence s’échelonne devant l’âme. Or, chaque fois, c’est la douleur qui fait sauter l’échelon. Tel est le secret de la vie.....


Voyez ! tout est vraiment préparé pour que la volonté soit de plus en plus chargée, et que, de plus en plus, le cœur ait du mérite à aimer. Un bien est-il acquis ? il commence à se perdre, afin que nous avancions sans lui. Ceux que nous aimions tendrement s’éloignent le jour où nous devions voir leur bonheur ; la fortune lentement amassée se disperse au moment d’en jouir ; le tout pour nous préparer à mourir précisément