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Page:Blandy - Le Petit Roi.djvu/107

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ennui de la toute-puissance. C’est ce que Mle Mertaud s’avisa de faire comprendre à Stéphane, sous une forme imagée, à propos d’un arbuste de sa serre.

C’était dans les premiers jours de leur installation. Stéphane lui montrait un pêcher qu’il avait rapporté de Moscou trois ans auparavant, et qui avait pous avec la rapidité des arbustes soumis à une chaleur factice. D’après les ordres de Stéphane, qui aurait trouvé au-dessous de lui d’écouter les avis experts du jardinier, on avait laissé croître l’arbrisseau en toute liberté sans lui adjoindre un tuteur et sans diriger la pousse de ses branches.

Jusque-là il n’avait rien produit que des feuilles, ce qui avait été attribué à sa jeunesse ; mais en arrivant à la Mouldaïa, Stéphane avait tenu à faire à Mlle Mertaud les honneurs de l’arbre fruitier français. Elle ne put s’empêcher de rire en arrivant devant ce pêcher qui lui rappelait si peu les espaliers trop symétriques, mais très-productifs de nos jardins. C’était une sorte de sauvageon assez fort de pied, très-fourni de branches et de feuilles, mais ébouriffé et tout tordu. Le tronc fléchissait, entraîné par la poussée surabondante des branches qui, à droite, retombaient et traînaient presque à terre.

Stéphane ayant défendu qu’on le dirigeât, qu’on le contrariât jamais, le pêcher se perdait au milieu d’un massif de fougères ; sur ses feuilles éparpillées, quatre ou cinq pétales de fleurs languissaient tristement.