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Page:Blandy - Le Petit Roi.djvu/106

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d’aurore et d’orange. Le miroir clair de plusieurs étangs reflétait l’ardent rayonnement du soleil, et plus près de la maison seigneuriale, au bas du coteau, sous un rideau de saules découronnés, dont le feuillage gris était entre-mêlé aux lances vigoureuses d’une haie de roseaux, la Moskova déroulait ses eaux, d’un bleu plus vif que l’azur du ciel moscovite.

Il est si bien admis parmi nous que la Russie est le pays des glaces et des neiges, qu’elle ne saurait être belle l’hiver sous son manteau de neige, sous sa lune éclatante, sous ses cieux profonds et piquetés d’étoiles brillantes, que la chaleur excessive de ses étés et sa superbe végétation étonnent toujours les Occidentaux. Ce paysage charma donc Suzanne et chacun jouit de sa surprise. D’ailleurs elle arrivait à la Mouldaïa dans les plus heureuses dispositions. L’aventure d’Axinia lui avait prouvé que Stéphane n’avait pas la nature foncièrement mauvaise qu’elle avait craint de trouver en lui. Cette âme orgueilleuse se montrant capable de retours généreux, Mlle Mertaud n’était pas loin d’accuser des travers de son élève le milieu qui l’entourait, plutôt que lui-même.

Rien, en effet, n’est si funeste aux enfants riches, dont l’inexpérience ignore les devoirs et les nécessités de la vie, que le droit de tout faire et de ne rien faire. Ce droit que leur laisse l’aveugle tendresse de leurs parents, développe en eux, avec cent travers, l’inévitable