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Page:Blandy - Le Petit Roi.djvu/121

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la porte d’une isba. Il s’en approcha ; aussitôt le cercle, presque uniquement composé de femmes et d’enfants, s’ouvrit devant lui.

Dans l’espace libre, cinq bohémiens allaient donner à l’assistance le spectacle national de la danse des ours, qui est un des grands plaisirs des mougiks russes. De bonne humeur ce jour-là parce qu’il était libre, Mlle Mertaud étant en promenade avec M. Carlstone et Arkadi, Stéphane se décida à faire galerie, et il s’assit sur le banc extérieur de l’isba, couvert par l’hôtesse d’un linge bien blanc pour faire honneur à ce spectateur inattendu.

Il y avait là, tenus par deux bohémiens au bout d’une longue corde, deux ours bruns, l’un jeune et superbe de pelage, l’autre presque gris de vieillesse. Quand Stéphane se fut assis, deux bohémiens tenant une sorte de violon rustique se mirent à jouer un air, chacun le sien, en même temps. Noble indépendance en dehors des plates habitudes de nos orchestres, et qui permet de distinguer les aptitudes particulières de chaque artiste en même temps qu’elle offre au spectateur une mélodie variée pour chacune de ses oreilles.

Dès les premiers sons — car l’on ne saurait dire : accords — les ours saluèrent l’assemblée avec la politesse qu’on devine, et se mirent ensuite à danser la cosaque avec des contorsions, des piétinements, des tours de hanches et des airs de tête penchée fort burlesques. L’assemblée s’amusait bruyamment, et Stéphane lui-même