Page:Blanqui - Cours d’économie industrielle 1836-1837.djvu/45

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nière palpable les funestes effets de l’instruction qu’on nous a donnée ; elle est uniforme pour tous, et c’est à peine si à vingt-cinq ans un homme peut être libre et se livrer à un travail productif. Les États-Unis peuvent en cela nous servir de modèle ; c’est à dix-neuf ans que le citoyen américain peut gagner sa vie. Pourquoi en est-il ainsi ? c’est que, lorsqu’il doit être fermier, par exemple, il ne passe pas sa jeunesse à retenir quelques paroles de latin pour savoir chanter au lutrin (on rit). Mais prenons le côté sérieux de ce système déplorable ; examinons quelles conséquences morales il en résulte : en France, quand un jeune homme veut se marier, il va mendier une femme, non pour elle, ni pour ses vertus ou ses qualités ; mais pour l’argent qu’elle peut lui donner, à lui à qui le travail devrait permettre d’en offrir. L’industriel Américain, au contraire, choisit celle qui a parlé à son cœur, lui offre son travail et s’enquiert fort peu de sa dot, pourvu que ses bonnes qualités lui donnent la certitude qu’elle l’aidera à faire fructifier l’état qu’il a embrassé. Il y a donc chez nous une partie de la population complètement oisive, et l’état se trouve privé d’une richesse incontestable. C’est quelque chose que de contribuer à soulager son père et à enrichir son pays ; sans qu’il soit nécessaire d’en reculer la frontière. La chose vaut la peine d’y penser. J’ai affaire tous les jours à des chefs d’industrie qui se plaignent continuellement de n’avoir pas de sujets. « On nous donne, me disent-ils ; force latinistes ; voire même force bachelier-ès-lettres ;