Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/27

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confiance en présence de l’ambition démesurée des Germains ; elles se préparaient tout simplement à se défendre contre une agression presque certaine ; elles voulaient se mettre en état de soutenir leur dignité menacée par les prétentions les plus inouïes.

— Les autres peuples, conclut-il, ont bien le droit de se prémunir contre vous. N’est-ce pas vous qui représentez un péril pour le monde ?

Le paquebot n’étant plus dans les mers américaines, le Commerzienrath mit dans sa riposte la hauteur d’un maître de maison qui relève une incongruité.

— J’ai déjà eu l’honneur de vous faire observer, jeune homme, dit-il en imitant le flegme des diplomates, que vous n’êtes qu’un Sud-Américain et que vous n’entendez rien à ces questions.

Ainsi se terminèrent les relations de Jules avec le conseiller et son clan. À mesure que les passagers allemands se rapprochaient de leur patrie, ils se dépouillaient du servile désir de plaire qui les accompagnait dans leurs voyages au nouveau monde, et aucun d’eux n’essaya de réconcilier le peintre et le capitaine.

Cependant le service télégraphique fonctionnait sans répit, et le commandant conférait très souvent dans sa cabine avec le Commerzienrath, parce que celui-ci était le plus important personnage du groupe allemand. Les autres cherchaient les lieux isolés pour s’entretenir à voix basse. Tous les jours, sur le tableau