antérieure aux lois abolitives de la féodalité (1790). Les conseils de préfecture sont compétents pour apprécier la valeur des titres produits, et déterminer, en cas de désaccord, le montant de l’indemnité due.
16. Enfin, il est encore une autre nature de dommage auquel peut donner lieu l’ouverture d’un canal, et ce cas se présente fréquemment : nous voulons parler des infiltrations des eaux à travers les terres riveraines. L’administration ne conteste pas le droit à l’indemnité au profit du propriétaire dont l’héritage est ainsi attaqué. Les efforts des ingénieurs tendent d’ailleurs à faire disparaître autant que possible cette cause de dommage, car en même temps qu’elle porte préjudice aux riverains, elle augmente les dépenses d’approvisionnement d’eau.
17. Les canaux, comme tous les travaux publics, peuvent faire l’objet de concessions par voie législative ; mais quelle que soit la durée de ces concessions temporaires ou perpétuelles, l’État n’en aliène pas la pleine propriété. La concession n’emporte que la jouissance à des conditions déterminées. Les grandes voies de communication que l’État concède ne sauraient perdre leur caractère qui en attribue le domaine éminent au souverain. Il s’ensuit que les compagnies concessionnaires ne pourraient convertir les canaux à d’autres usages qu’à ceux de la navigation, et que le Gouvernement conserve sur les canaux concédés la même surveillance et la même action que celles qu’il exerce sur toutes les voies navigables du pays. Une ordonnance royale du 20 novembre 1842 a formellement rappelé ce droit de l’État. Ce droit n’irait pas, cependant, jusqu’à prescrire des mesures en dehors des conditions de la concession. Ces conditions sont réglées par des cahiers de charges. Il n’entre pas dans le cadre de cet article de discuter les dispositions des cahiers de charges des diverses concessions de canaux, ces dispositions n’offrent, d’ailleurs, d’intérêt qu’au point de vue de l’exploitation.
18. Nous avons énoncé plus haut que de tout temps les canaux avaient été considérés comme une dépendance de la grande voirie. La loi du 29 floréal an X les a assimilés sous ce rapport aux rivières flottables et navigables. Les règlements généraux sur la voirie fluviale leur sont donc applicables. Ces prescriptions sont à peu près toutes résumées dans l’arrêt du conseil du 24 août 1777. Elles interdisent notamment le jet ou le dépôt dans les canaux de tout objet pouvant embarrasser ou atterrir le lit, la circulation sur les chemins de halage dans un intérêt autre que celui de la navigation, et toute manœuvre pouvant nuire à la sûreté et à la liberté de la navigation. Nous ne pouvons que renvoyer au texte même de cet arrêt qu’il serait trop long de reproduire. Ajoutons cependant qu’indépendamment des règlements généraux, il existe pour chaque canal un règlement particulier qui détermine les conditions de police spéciales à ce canal. Ces règlements sont arrêtés par les préfets avec la sanction ministérielle. Ils sont rédigés d’après un modèle uniforme ; ainsi, ils indiquent les conditions à remplir pour naviguer, règlent la marche des bateaux en service ordinaire ou en service accéléré ; précisent les conditions de trématage et de priorité de passage aux écluses ; prescrivent des mesures d’ordre pour le débarquement, l’embarquement et l’entrepôt des marchandises sur les ports. Toute infraction à celles des prescriptions de ces règlements particuliers qui rentrent dans les cas prévus par les règlements généraux, doit être poursuivie et réprimée comme contravention de grande voirie ; les infractions aux autres dispositions n’ont que le caractère de contravention de simple police.
19. Les ouvrages d’art et les dépendances des canaux sont, comme ouvrages publics, sous la protection et la sauvegarde de l’autorité, et tout dommage causé à ces ouvrages constitue une contravention de grande voirie.
Est-il nécessaire de faire remarquer que pour tout ce qui a trait à la police et à la conservation des canaux, aucune distinction n’est à faire entre les canaux concédés et les canaux exploités par l’État. Dans quelque caisse que soient versés les produits, les canaux restent toujours voies publiques et à ce titre sont régis et protégés par les mêmes lois et règlements.
20. L’entretien des ouvrages d’art, le curage des biefs nécessitent des chômages. Ces chômages sont préjudiciables au commerce, et les efforts de l’administration tendent à les rendre moins fréquents et moins longs. L’époque et la durée de ces chômages sont déterminées par une décision du ministre des travaux publics et portées à la connaissance du public par des arrêtés préfectoraux.
21. L’exécution première des canaux, leur entretien annuel entraînent des dépenses considérables ; de là la nécessité de prélever sur le commerce qui emprunte ces voies de communication des droits de navigation. Ces droits que l’on désigne sous le nom de péage, sont déterminés pour chaque canal par des décrets ou ordonnances. D’abord très-élevés, ces droits ont été successivement réduits, notamment sur les canaux de l’État ; ils le seront sans doute encore ; sur les canaux concédés, les tarifs dont la perception a été autorisée par les actes de concession, ne peuvent être réduits qu’avec le consentement des concessionnaires.
Les droits de navigation sur les canaux exploités au compte de l’État, se perçoivent, comme sur les rivières navigables, par des agents spéciaux désignés sous le titre de receveurs de navigation et qui relèvent de l’administration des contributions indirectes. Ces droits sont perçus par distance de 10 kilom. et par tonne de l,000 kilogr.
22. Indépendamment des droits de navigation, les canaux donnent des produits accessoires. Ces produits comprennent la pêche dans les biefs, la coupe des herbes qui croissent sur les francs-bords et des plantations élevées sur les berges ; enfin, des prises d’eau peuvent être concédées soit pour l’irrigation des terres riveraines, soit pour la mise en jeu d’usines établies sur les chutes. L’affermage de la pêche et des produits des francs-bords et des plantations est fait par le ministère des travaux publics avec le concours du ministère des finances, d’après des cahiers de charges préparés par les ingénieurs des ponts et chaussées et approuvés par les deux départements ministériels. Les autorisations de prise d’eau et les concessions de chutes sont accordées moyennant des redevances déterminées et après l’accomplissement des formalités prescrites en pareille matière.