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par ?’T prodigue sont’soustraites pour un certain temps au travail de fécondation et de reproduction qui est la destination naturelle du capital ; la communauté en souffre dans ses intérêts moraux, .parce que la prodigalité est presque toujours l’effet et ia cause de mœurs dissolues, d’habitudes mauvaises. Mais c’est un terrain où la loi ne peut rien faire, si ce n’est d’empirer le mal par une immixtion maladroite, qui stimule parce qu’elle est provocante. De plus, si la prodigalité est toujours condamnable, il est souverainement difficile d’établir la limite entre ce défaut et le luxe si commun de nos jours. La femme de l’artisan aisé est en 1873 mieux habillée et assurément mieux pourvue en linge que la châtelaine du quinzième siècle ; l’habitation du bourgeois du dix-neuvième siècle offre sans conteste plus de confort et plus d’élégance que n’en bBrait la demeure de maint baron ou du du moyen âge ; ]e prolétaire même se nourrit mieux et voyage plus commodément que le plus ller noble d’une autre époque. A mesure que s’élève le niveau de l’aisance matérielle et de la culture intellectuelle, s’élève aussi le niveau des besoins matériels et intellectuels. La jouissance qui hier était du superflu devient indispensable ; ce à quoi les privilégiés de la fortune seuls prétendaient naguère, est réclamé maintenant par tous ou presque par tous. Le luxe n’est plus, à de rares exceptions prés, dans la nature de la jouissance permise, mais seulement dans l’extension qu’elle prend. Et pourvu que le développement des exigences de la vie soit en proportion du développement des ressources, aucun esprit raisonnable ne voit un mal absolu dans le progrès du luxe ce progrès témoigne généralement en faveur du raffinement du goût

des masses il agit en même temps comme stimulant efficace du travail, et seconde la marche ascendante de l’industrie humaine dans toutes ses manifestations.

L’impôt surle luxe ne saurait donc conserver de. nos jours rien du caractère répressif et d’amende qui l’avait distingué à sa naissance. Au fond, ce n’est pas le luxe qu’on impose aujourd’hui on y voit non l’objet en lui-même imposable, mais plutôt les signes extérieurs d’une fortune ou partie de fortune qui peut être imposée ; l’on estime que telle ou telle jouissance dite de luxe suppose chez les citoyens qui se l’accordent un certain superflu pouvant être soumis à un prélèvement OscaL C’est l’unique base rationnelle de l’impôt sur le luxe. Mais on comprends d’après les considérations qui précèdent à quel point it est difficile de dire où commence le luxe, soit d’une manière générale, soit pour chaque classe de citoyens. A part ce que nous avons dit de l’élévation successive du niveau général des

besoins, il y a des jouissances (ou des dépenses paraissantdonner des jouissances) qui sont imposées à tels on tels citoyens par leur situation et que se refusent volontiers d’autres citoyens quoique plus aisés. Il en résulte que, de fait, l’impôt du luxe redevient souvent une ~orte d’amende et ffsppe sur le contribuable qui est justement le moins en état de payer. La, taxe, par exemple, qui se paye sur les domestiques ne saurait toujours être traitée

d’impôt de luxe ; le bourgeois aisé qui a une nombreuse famille peut avoir besoin de plus de domestiques que le riche propriétaire ou rentier sans enfants. L’impôt sur les voitures, véritable impôt de luxe, surtout qusud l’on excepte les voitures et les chevaux de service, ne réussit guère en France où on l’a. introduit, supprimé et réintroduit (voy. Voitures) ; son rendement signifie peu dans d’autres contrées encore ; l’impôt sur les pianos, projeté également dès 1862, a du être abandonné par suite des nombreuses réclamations anticipées qu’il suscitait. Les véritables impôts de luxe sont peu importants ; en général cette sorte d’impôts tend à se confondre avec les impôts de consommation ; la distinction, qui nulle part n’est tracée d’une façon précise, consiste en ce que le premier frappe les objets d’une consommation plus facultative, moins indispensable, ce qui ne veut pas dire qu’elle soit toujours moins générale. Quand le fisc charge la farine, la viande, la bière, l’huile, le charbon, personne n’y verra autre chose qu’un impôt de consommation ; mais on penchera à voir un impôt de luxe dans la taxe qu’il demandera du vin, des spiritueux :, du tabac, du thé, du café, du sucre. Les usages des populations tendent à déplacer constamment la limite qui sépare les impôts de consommation des impôts de luxe, et assez généralement au profit des premiers. Les spiritueux ne sont pas un article de première nécessité, et la taxe qui les frappe peut justement passer, d’une manière générale, pour un impôt de luxe mais il y a certaines classes d’ouvriers (les mineurs notamment et ceux. qui travaillent le fer) pour lesquelles 1 eau-de-vie est un cordial presque indispensable, aussi nécessaire, dit-on, que le pain. il y a trente ans, le thé était en Angleterre, comme il l’est aujourd’hui encore en France, une consommation de luxe ; aujourd’hui, le thé est devenu pour le peuple anglais, ce qu’il est depuis longtemps en Hollande, la boisson nationale. En 1863, il s’est même formé en Angleterre, sur le modèle de la célèbre association dont Cobden était le chef, une eN~t~-esA/M~a.~ea~Me pour faire cesser le prélèvement

qu’opère le fisc, par la taxe du thé,, sur le déjeuner du peuple. Cette ligue a. déjà enregistré plus d’un succès. Faut-il citer encore le tabac. ? Si la taxe qui le frappe voulait rester ce qu’elle avait été au début, un, impôt de luxe, elle ne pourrait aujourd’hui atteindre que les cigares et les tabacs de prix.. Et cette remarque sur les difncuités d’une délimitation précise entre. les besoins réels et les besoins de. luxe ne s’applique, pas seulement. aux consommations proprement dites. Avoir en. été un.logement & la campagne en ! dehors du. logement. de ville passait, naguère pour le privilége. de. l’opulence ; quel est, aujourd’hui le bourgeois tant soit pen aisé de Paris qui croit, pouvoir s’en dispenser ? Son. médecin ne le : permettrait pas. De même d’une, foule d’autres