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Mais M. Edmond de Goncourt, qui est miséricordieux quoique juste, ne supportera pas qu’elle succombe et il la retirera de cette planète avant qu’elle ait souillé sa robe d’innocence.

Cependant, la physiologie doit avoir son cours, « l’ovulation appelle la fécondation, » il n’y a pas à changer ça, et, ma foi, le mariage, aux yeux de la jeune fille, prend, chaque jour, l’aspect de plus en plus arrêté « d’un phallus dessiné sur un mur. »

Le sévère Edmond ne permettant pas qu’il se dessine d’une autre façon, l’intéressante vierge meurt de la consomption du désir et ainsi finit le dernier roman du dernier des Goncourt.

Sera-ce vraiment son dernier roman ? Hélas ! qui oserait en répondre ? Il y a dans Chérie une phrase mélancolique où se niche peut-être le secret du découragement de l’auteur :

« Rien n’est plus rare, gémit-il, qu’un derrière chez une Parisienne. »

Est-ce là tout ? Alors Dieu fasse que de nouvelles correspondances anonymes le rassurent sur ce point et qu’il nous inonde d’une quarantaine de nouvelles analyses du même genre, auxquelles soit donnée la vertu de précipiter l’heure désirable où cette immonde nourriture, venant à surcharger l’estomac humain, sera définitivement rejetée dans les ténébreux égouts littéraires d’où la sénilité contemporaine l’a fait sortir !


17 mai 1884.