Page:Bloy - Exégèse des Lieux Communs, Mercure de France, 1902.djvu/131

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Bourgeois riche, aussitôt que prendra fin la septième année d’abondance.

Il a le genre de laideur de Barrès auquel il ressemble avec addition de crasse. Bonne éducation belge et muflisme aigu. En outre, prétentions à la pensée et à une sorte d’omniscience. On est informé tout de suite qu’il sait assez de grec pour traduire au besoin le code civil ou la table des logarithmes en vers asclépiades ou choliambiques. Il ne sait pas moins d’hébreu et le syriaque n’a guère de secrets pour lui. Quant au sanscrit, c’est plutôt sa langue. Il ne fait, d’ailleurs, aucun usage de ces connaissances précieuses et on s’en étonne. Mais il ne veut pas éblouir, c’est assez qu’on sache qu’il les possède.

Les ongles, extraordinairement longs et taillés en griffes d’albatros, font un étrange contraste avec la lèvre toujours pendante, la face livide et les yeux cuits. Un ami m’avait pourtant conseillé de me défier des individus qui ont la bouche pourrie et les pieds sales, ce qui est aussi le cas. J’eus le tort de ne pas écouter cet avertissement prophétique. Le nom seul d’Edgar n’aurait-il pas dû me mettre en défiance ?

Que voulez-vous ? Je croyais lui devoir quelque chose et je poussai l’imprudence jusqu’à lui offrir l’hospitalité dans ma maison, le sachant fort menacé. Lorsqu’il voulut bien me faire entendre qu’il n’était pas un domestique, ce qui ne tarda guère,