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CXXIII

La Nature.


Je mentionne celui-ci, parce qu’il me rappelle ma jeunesse. Il est aujourd’hui fort déchu et ne s’utilise guère. On est devenu trop savant. De mon temps, la nature signifiait encore un tas de choses. — Laissez faire la nature, disait-on à tout propos, laissez agir la nature. Maintenant on ne parle plus que de microbes et la nature est remplacée par une seringue. Idole pour idole, j’aime mieux l’ancienne. Elle était agréable à voir, beaucoup moins sotte et beaucoup moins dangereuse. Elle fut adorée, surtout au dix-huitième siècle, époque où subsistait encore en France un vif sentiment du ridicule. Il est certain que notre Bourgeois a perdu ce sentiment là. Sans doute il ne dit plus, comme au temps de Jean-Jacques Rousseau, que le retour à l’état de nature serait l’idéal. Un je ne sais quoi l’avertit qu’il y aurait de l’imprudence à paraître in naturalibus à son café, à se manifester brusquement à poil, dans le voisinage des sergots ; mais il supporte et même il sollicite, entre beaucoup d’autres choses, les aventures malpropres et fabuleuses de la médecine contemporaine.