Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

étaient tout son bien et je les ai remplacés par des prospectus en papier de couleur… Cette chrétienne qui me chérissait sera forcée de mendier son pain.

Comme je perdais continuellement, j’étais prête à tous les crimes dans l’illusion de me rattraper… Enfin, je dois plus de Quatre-vingt mille francs ! Mon oncle seul pourrait les payer, mon oncle riche dont j’ai souvent désiré la mort. Allez le trouver, je vous en supplie, aussitôt qu’on m’aura mise dans la terre et dites-lui bien que c’est moi qui meurs, et que je meurs épouvantée de toutes ces malédictions sur ma pauvre tombe !… Épouvantée !…

L’agonisante poussa un grand cri et, me jetant les bras autour du cou, aboya ces derniers mots que j’entends encore :

— Ah ! si vous saviez… si vous saviez ce que je vois !…

C’était la fin. Je fus forcé de me délier du cadavre dont les ongles m’entraient dans la chair et dont les yeux, incroyablement dilatés, regardaient toujours…

L’oncle, naturellement, ne paya rien et Lépinoche, à qui je racontai cette mort, quelque temps après, m’avoua qu’il trouvait tout cela bien triste, vraiment.

Quatre ans plus, il épousait la fille d’un larbin