Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/277

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Je sais bien qu’il y a la ressource de ne pas les voir. Mais on sent tout de même qu’ils existent ; on entend leurs supplications inharmonieuses, on risque même d’attraper un peu de vermine, — vous savez bien, mesdames, cette ignoble vermine pédiculaire qui « ne se laisse pas caresser aussi volontiers que l’éléphant », comme disait notre grand poète Maldoror, et qui abandonne elle-même de bon cœur le nécessiteux pour se fourrer dans les manchons ou les pelisses d’un inestimable prix.

Tout cela me plonge dans une affliction très amère, et j’applaudis avec du délire à la haute idée d’une immolation générale des indigents.

Toutefois, en attendant la bonne nouvelle des massacres, me sera-t-il permis de demander à ceux d’entre vous qui ne se sont jamais grattés, s’il leur fut donné d’observer, sans télescope, l’inégale répartition de la certitude philosophique en ce qui touche quelques axiomes prétendus ?

Pour parler d’une autre manière, où trouver un homme, non encore vérifié et catalogué comme idiot de naissance ou comme gâteux, qui osera dire qu’il n’a pas l’ombre d’un doute sur sa propre identité ? Car tel est le point.

Très ingénument, je déclare que, songeant parfois au récit de l’Évangile et à l’étonnante multitude de pourceaux qui fut nécessaire pour loger convenablement les impurs démons sortis d’un seul homme, il