Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/49

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s’il y avait eu, dans sa demeure, un agonisant sublime dont il eût été nécessaire à l’équilibre des univers de ne pas rater le dernier soupir.

Et si l’arrivant, non effarouché par les yeux de flamme du solitaire, voulait passer outre, malgré cet étrange accueil, il ne pouvait jamais s’introduire avec trop de rapidité, et la porte, à l’instant même se refermait en coup de vent, comme un piège à rats sur un musaraigne. Témérité rare dont peu d’hommes, je vous en réponds, furent capables.

Le redoutable Damascène, alors, à demi courbé, se frottait les mains, la pointe en bas et les paumes tout près du menton, exprimant ainsi l’allégresse d’un cannibale sûr de sa proie.

Et la fanfare de ses récriminations éclatait pendant une heure. Il devenait un torrent de plaintes dont on entendait, d’abord, le grondement sourd et la grandissante rumeur quand il arrivait, au loin, des montagnes bleues ; puis le rauque mugissement, de plus en plus clair, qui s’épandait à la façon d’une nappe immense ; et enfin, le fracas énorme des dislocations, des écroulements qu’il apportait, de toutes les clameurs confondues.

Il en avait fameusement sur le cœur, allez ! Et je suppose qu’il aurait fallu la mort pour qu’il cessât de vociférer, jusque pendant son sommeil, contre les éditeurs, les journaux, l’Académie, les sociétaires de la Comédie-Française et, en général, contre