Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/92

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logie ou d’histoire et crevé sous elle un égal nombre d’éditeurs. Il n’y avait pas assez de boîtes sur les quais pour recueillir ses tomes que des journaux agonisants offraient en prime à leurs abonnés et qu’un cartonnage peu précieux faisait aptes à récompenser l’application des jeunes élèves aux distributions de prix.

Fille d’un coriace traducteur d’Homère, dont elle seule déplorait la mort, et d’une effroyable dame boucanée par les solstices qu’on croyait une vieille espionne, cette Corinne des sarcophages ne se consolait pas de n’avoir pu naguère épouser un homme célèbre dont elle se crut adorée.

Ayant été belle en des temps anciens, au dire de quelques paléographes, elle s’était, en frémissant, résignée à planter l’arbre de la liberté philosophique au milieu de ses propres ruines.

Toujours habillée de noir, jusqu’au bout des ongles, et les cheveux en nid de cigogne, les rares tranches d’elle-même qu’une bienséance toute britannique lui permettait d’exhiber, étaient poisseuses d’une couche épaisse de crasse dont les premières alluvions remontaient sans doute à la Révolution de Juillet.

Par le visage, elle ressemblait à une pomme de terre frite roulée dans de la raclure de fromage. Ses mains donnaient à penser qu’elle avait « déterré sa bisaïeule », comme dit un proverbe scandinave.