Page:Bloy - La femme pauvre.djvu/46

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Nom signifie la Mère des Vivants… Dieu, qui fait toutes nos pensées, a voulu, sans doute, que je me souvinsse d’Elle en vous voyant. Adressez-vous donc à cette mère qui vous est plus proche que celle qui vous engendra. Elle seule, croyez-moi, peut vous secourir, puisque vous ne ressemblez à personne, pauvre enfant qui avez soif de la Vie !… Peut-être aussi l’Esprit-Saint vous a-t-il marquée de son redoutable Signe, car les voies sont bien inconnues… Adieu, ma douce fille, je repars dans quelques instants pour des contrées éloignées d’où je ne reviendrai probablement jamais, à cause de mon très grand âge… Cependant, je ne vous oublierai pas… Quand vous serez dans les flammes, souvenez-vous du vieux missionnaire qui priera pour vous au fond des déserts.

Et il était parti, en effet, après avoir laissé une pièce de vingt francs, sur l’accoudoir du prie-Dieu, où Clotilde resta clouée par l’étonnement et par le respect le plus indicible.

Incapable de se renseigner sur-le-champ, elle ne sut rien de ce vieillard qu’elle crut avoir été envoyé tout exprès par le Père des enfants qui souffrent. Il fut pour elle, simplement, le « Missionnaire ».

En souvenir de lui, elle s’adressait souvent avec une tendresse naïve à cette Mère commune dont nul autre prêtre, assurément, ne lui eût ainsi parlé et souvent aussi elle se demanda ce que pouvaient bien signifier ces « flammes » au milieu desquelles il faudrait, un jour, qu’elle se souvint de son visiteur…

Elle se fit naturellement voler les vingt francs par sa