Page:Bloy - La femme pauvre.djvu/67

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de lui faire entendre la même question qu’en un pareil déconfort lui avait autrefois adressée le Missionnaire.

Dans le trouble de son étonnement, elle avait cru reconnaître la voix même de ce cher vieillard qui représentait pour elle l’unique rafraîchissement terrestre qui lui eût été accordé.

Du même coup, elle se sentit transportée d’espoir et son visage exprima ce sentiment, — tout son beau visage ruisselant de pleurs que le peintre admirait silencieusement.

L’ayant à peine regardée, lorsqu’elle était survenue au milieu d’une oiseuse discussion qui l’exaspérait, il la trouvait maintenant très touchante et presque sublime, dans le décor de son affliction.

L’indifférence eût été, d’ailleurs, assez difficile. Il sortait de cette physionomie comme une main de douceur qui tirait l’âme de ses enveloppes et la colloquait dans une prison de cristal.

Ce n’était pas la traditionnelle Pécheresse de l’Évangile dont le sacrilège paganisme de la Renaissance a tant abusé. Ce n’était pas non plus, cependant, la sœur de ces frêles Bienheureuses qui se consument, depuis deux mille ans, dans l’interminable procession des Saints, comme les flambeaux intangibles d’une Chandeleur éternelle.

Il n’y avait pas, en cette fille prosternée, beaucoup plus qu’une pauvre petite chair amoureuse, pétrie par les Séraphins de la Misère et parée seulement des plus pâles myosotis de la Douleur. Holocauste résigné de la vie