Page:Bloy - La femme pauvre.djvu/66

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sans savoir pourquoi, demeura une minute silencieux, la bouche entr’ouverte, les yeux fixés sur le paravent.

— Eh bien ! qu’est-ce que j’ai donc ? murmura-t-il. Est-ce que cet idiot serait contagieux, par hasard ?

Il s’approcha et, prêtant l’oreille, perçut comme un faible râle, très étouffé, très lointain, semblable à celui de ces apocryphes défunts que le poète des épouvantes entendait agoniser sous la terre.

Écartant brusquement le léger meuble, il vit alors la malheureuse, agenouillée, les épaules nues et le visage enfoui dans un misérable fichu de laine bleue, la seule pièce de son vêtement qu’elle eût enlevée.

Évidemment, le cœur lui avait manqué tout de suite, elle s’était affaissée de désespoir et, depuis un quart d’heure environ, elle étouffait, de ses deux mains, d’horribles sanglots qui la secouaient tout entière.

Gacougnol, surpris et apitoyé, fut aussitôt saisi de cette pensée que son rire de tout à l’heure avait été l’accompagnement de ces larmes extraordinaires et se penchant avec émotion sur la douloureuse :

Mon enfant, dit-il, pourquoi pleurez-vous ?


IX



Ces simples mots eurent l’effet d’une percussion magnétique. D’un mouvement d’animal rapide, Clotilde releva la tête et regarda follement cet homme qui venait