Aller au contenu

Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/363

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
335
APPENDICES

ancrage, emporte et ballotte dans la haute mer les trois autres navires, les tlent en péril, comme pour marquer, par cette différence de sort, la différence de leur destination, et mieux faire ressortir une protection toute spéciale !

« Et que penser du beau temps qu’on dirait d’accord avec la tempête, afin de ramener à Colomb, le dimanche, au même lieu, les caravelles dispersées au large et disparuos dans l’espace, comme pour leur permettre de solenniser ce jour, conformément aux pieuses habitudes de l’Amiral ?

« Ces étonnantes prévoyances sont-elles l’œuvre du Hasard ? En ce cas du moins, ce Hasard est tellement ingénieux dans ses combinaisons, transcendant dans ses calculs, il s’éloigne si fort de l’accidentel, de l’imprévu, qu’on ne peut guère le reconnaître ; et si c’est réellement lui, avouons qu’il est bien changé ; il ne ressemble pas à lui-même.

« Les ennemis de Colomb, frappés de l’immunité qui préservait son bien et ses équipages, et voyant de quelle façon, en une seule fois, il avait été vengé de ses persécuteurs, attribuaient à son pouvoir magique cette terrible journée[1].

« Quand, en se rappelant la haute piété de Colomb, inventeur et donateur de cette terre où il avait planté la Croix, on rapproche par la pensée ses gigantesques travaux, ses droits sucrés, ses intentions si pures, de l’attentat commis contre lui par les ingrats, les rebelles, le mandataire d’un pouvoir trompé, arrachant à son gouvernement, jetant en prison chargé de fers et bannissant de l’île le messager du Salut, on sent le cœur, d’accord avec la raison, reconnaître icl une grande leçon donnée au monde. Ainsi que la sagesse du Créateur se révèle par les merveilles de ses œuvres,

  1. « Por cuyo motivo podian culparle los que le aborrecian de que havia tramado aquella borrasca por arte magia, para vengarse de Bobadilla y de los demás enemigos suyos que iban en su compañia. » — Hernando Colon, Historia del Almirante don Cristobal Colon, cap. lxxxviii.