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Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/40

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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

siter une aussi longue, une aussi épouvantable expiation, endurée, non par un seul peuple, mais par des centaines de nations, pour quelques-unes desquelles elle dure encore ? Que dis-je ? la plupart d’entre elles ne virent se lever aucune lumière et l’aurore de la civilisation orientale fut pour le multitude de ces créatures infortunées comme l’annonce d’un déluge de sang et de feu par-dessus les vagues de l’Atlantique.

Cet hémisphère terrestre inconnu — semblable à cette mystérieuse moitié de la lune perpétuellement inobservable — roulait dans les espaces, avec le reste du monde, depuis deux millions de jours. En vain le Candélabre de la Révélation avait-il été promené d’Orient en Occident. Depuis Abraham étendant sous les pieds du Messie futur — comme une miraculeuse voie lactée de cœurs humains — toute sa stellaire postérité, pendant vingt-deux siècles ; et, de Jésus, vainqueur de la Mort, à Mahomet, vainqueur de Byzance, d’innombrables générations, obscures ou lumineuses, avaient trempé la terre de leurs larmes, de leurs sueurs ou de leur sang. Des civilisations puissantes avaient poussé leurs influences dans toutes les directions de l’esprit humain. De miraculeuses intelligences avaient épuisé toute conjecture. Les saints, les martyrs, les apôtres même à qui le Sauveur avait dit de sa bouche d’enseigner toutes les nations, avaient accompli leur mandat sur une seule moitié du globe, délaissant ainsi l’autre moilié dans une ignorance invincible de la Rédemption. Le plus audacieux, le plus infatigable des Douze, Témoin privilégié de la Résurrection du Fils de Dieu, — celui-là, disait sainte Brigitte, qui est le trésor de Dieu et la lumière du monde, — Thomas Didyme, laissant