Aller au contenu

Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/50

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
22
LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

échos retentissant du creux des montagnes : toutes ces choses les faisaient mourir d’effroi…

« Il n’y avait point de feu si fort qui pût leur donner aucune lumière et les flammes limpides des astres ne pouvaient éclairer cette horrible nuit.

« C’est alors que les prestiges de l’art magique parurent dérisoires et que cette sagesse glorieuse fut bafouée avec ignominie.

« Car ceux qui promettaient de bannir toutes craintes et toutes perturbations de l’âme languissante, languissaient eux-mêmes, ridiculément, pleins de terreurs…

« Ils étaient ious dormants d’un même sommeil dans ectte nuit d’impuissance qui leur était arrivée du plus profond des enfers

« Or, tout le reste du monde était illuminé d’une brillante lumière et accomplissait ses œuvres, sans aucun empéchement.


« Eux seuls étaient écrasés de cette pesante nuit, image des ténèbres qui devaient leur survenir. Et ils étaient devenus plus insupportables à eux-mêmes que leurs propres ténèbres[1]. »

Eux seuls ! Quel effrayant destin ! et quel maître pour remplacer Dieu ! Une chaîne de ténèbres pour toute théologie et la suprême, la perpétuelle épouvante pour toute législation ! Du nord au sud, on pouvait marcher toute une vie d’Indien et faire quatre mille lieues sans rencontrer l’Espérance. Cette merveilleuse nature qui ravissait les Conquistadores, — au point de faire penser un instant à Christophe Colomb que le Chérubin terrible ne faisait plus sentinelle avec son épée de feu

  1. Sap. cap. xvii.