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Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/83

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X

Il y a quelques années, un évêque qui laisse humblement sa piété planer comme un aigle au-dessus de son intelligence, reprochait à Christophe Colomb de ne pas ressembler à saint Benoît Labre ou au Curé d’Ars. Évidemment, ce prélat n’est pas de ces hommes que le silence des astres épouvante, selon le mot de Pascal. Loin de là, c’est un supérieur ecclésiastique des plus corrects et qui doit réaliser d’une manière parfaite l’idéal gallican de la dévotion : in pietate insigni minime singularis. C’est-à-dire, la haine de toute singularité, de toute exception, de toute transcendance ; la déflance instinctive de tout enthousiasme : et de tout magnanime emportement. Pour de tels esprits, l’exaltation de l’amour est toujoursune ridicule extravagance, le lyrisme de la pensée un regrettable délire et les plus sublimes aperceptions du génie une absurde recherche de midi à quatorze heures. C’est ainsi qu’il leur plaît de s’exprimer.

Quant à leur admiration pour saint Benoît Labre et le Curé d’Ars, il n’y faut pas trop compter. Les saints ont toujours été des hommes singuliers, disait Massillon,