Page:Bloy - Le Salut par les juifs, 1906.djvu/150

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Après un tel don où la Tendresse infinie s’est pour ainsi dire épuisée, le même Seigneur « ne peut » plus rien cacher à celui qu’il aime, et il lui fait connaître son terrible dessein de perdre Sodome et Gomorrhe dont la clameur est montée jusqu’à lui.

L’espèce de métonymie scripturale employée ici pour exprimer l’énormité inouïe du péché que Dieu va punir, laisse dans la pensée une empreinte singulière. Il paraît que le crime a une voix comme l’innocence, et que l’abomination de Sodome crie comme le sang d’Abel.

— Je descendrai, ajoute le redoutable Interlocuteur, et je verrai si leurs œuvres répondent à ce cri qui est venu vers moi ; je veux savoir si cela est ainsi ou si cela n’est pas.

Ces derniers mots sont une provocation ineffablement paternelle à la prière audacieuse qui va suivre. Ce que le Seigneur veut voir surtout, c’est l’humilité de son serviteur, humilité qui éclatera d’autant plus que ses supplications seront plus pressantes et, en apparence, plus téméraires. C’est pour cela qu’il descend, et c’est ce prodige de sa Grâce qu’il veut s’attester à lui-même.