Page:Bloy - Le Sang du pauvre, Stock, 1932.djvu/207

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autre sang que celui qu’il tient d’Abraham ne serait pas efficace pour laver les péchés du monde ?

Assurément Rosenfeld, qui n’était qu’un ouvrier fort ignorant, ne devait pas avoir lu saint Paul que ne lisent guère les Juifs. Mais son génie de poète et le sens profond de sa Race lui faisaient assez entrevoir ces choses. Aussitôt qu’il commença de chanter, sa place fut — je l’ai dit en commençant — à la droite du Tombeau de Jésus-Christ. Sans le savoir, il continua les Affirmations impérissables de l’Apôtre des nations et, n’ayant jamais été poète que pour les pauvres, il se trouva — dans le sens le plus mystérieux — l’Avoué du Saint Sépulcre, roi sans couronne et sans manteau de la poésie de ceux qui pleurent, sentinelle perdue au Tombeau du Dieu des pauvres bienheureusement immolé par ses ancêtres. Alors, par la seule force des lois adorables son judaïsme fut dépassé, débordé de tous les côtés par le sentiment d’une confraternité universelle avec les pauvres et les souffrants de toute la terre.