Page:Bloy - Le Sang du pauvre, Stock, 1932.djvu/99

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dain partage volontiers son abstinence. Combien d’autres choses encore ! mais qui peut tout dire ? L’essentiel devant Dieu et devant les hommes, devant les hommes surtout, c’est la ligne de démarcation et messieurs les prêtres mondains la tracent d’un doigt aussi lumineux et non moins inexorable que celui de Moïse écrivant le Décalogue sur les Deux Tables de pierre.

Reste à savoir si ces législateurs « parlent à Dieu face à face, comme un ami parle à un ami ». Il est à craindre, j’ose le dire, que la question ne soit pendante. Cela est, en vérité, fort à craindre. On a beau adorer la richesse, il y a, tout de même, un préjugé tenace qui milite obstinément pour la pauvreté. C’est comme si la très-modeste lance qui perça Jésus avait percé tous les cœurs. Cette plaie ne se ferme pas depuis vingt siècles. Il y a les lamentables sans nombre, femmes, vieillards, petits enfants ; il y a les vivants et les morts. Tout ce peuple saigne, toute cette multitude jette sang et eau au milieu de la Croix de misère, en Orient, en Occident, sous tous les ciels,