Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/153

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d’abord, ce qu’on peut imaginer de moins excitant. Visiblement consumée de phtisie et la face en tête de mort, on l’appelait l’Épitaphe, dénomination singulièrement expressive et presque géniale, après laquelle une tentative de portrait serait ridicule.

Eh bien ! les ravages de ce couple furent inouïs. Tout le monde voulut de cette fille et tout le monde en redemanda. Les plus favorisés ou les plus riches étaient reçus dans la voiture du tringlot, voiture hors de service et immobilisée comme tout le reste, au-devant de laquelle se liquéfiait le cheval enterré, lui aussi, dès le commencement, dans quelque chose de bleuâtre qui prétendait à l’honneur d’être de la boue. La place en était marquée, fort heureusement, par les quatre sabots en l’air, dressés au-dessus de l’effroyable magma qu’on pouvait ainsi éviter.

Les roues de ce char n’ayant pas encore succombé, l’intérieur passait pour un endroit sec, assimilable, par conséquent, aux plus lointains paradis, et les élus étaient fort enviés. On essayait, à la sortie, de les faire tomber dans le cheval.

Cependant il y avait de bons jours, des jours de vadrouille pour l’Épitaphe que ces mobilisés indéracinables appelaient alors : Madame.

Elle faisait la tournée des tentes sur une manière de traîneau dont on se lançait les cordes — équipage suggestif de la claie des suicidés — et