Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/165

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

poigna tout de suite par la peau du ventre son hôte, le maire en personne, qui était venu implorer lui-même l’honneur de le posséder sous son toit, et le secouant à lui faire tomber les cornes, lui demanda l’explication de cette anomalie séditieuse.

Le fonctionnaire malchanceux protestant de son innocence, répondit qu’il avait tout tenté pour empêcher cette mauvaise action.

— Nous allons voir ! cria le colonel.

Et il donna l’ordre de réunir à l’instant même dans la rue tous les habitants actuels du village, hommes ou femmes.

Cela fait, il se dirigea, suivi de ce troupeau crevant de peur, vers la maison Thibaut. Dès la première sommation, la petite Solange se présentait dans le cadre de la porte, éclairée par le feu mourant de son ambulance pitoyable.

Elle parut charmante comme les pâles fleurs et triste comme le pressentiment de la mort. Derrière elle s’entendait le râle des moribonds pour lesquels elle ne pouvait plus donner que sa vie.

— Toi, d’abord, lui dit l’Allemand, tu coucheras avec moi ce soir.

— Sale cochon ! répondit la fille, me prends-tu pour une truie, par hasard.

Cette réponse lui valut un soufflet atroce qui la jeta par terre, le visage en sang. Aussitôt un cri bizarre se fit entendre et l’idiot, plein de beuglements, s’élança sur le bandit.