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Page:Blum - En lisant, 1906.djvu/23

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en Italie, le jeune Philippe et ses parents traversent le Simplon, dans la neige, et cette traversée est peut-être le plus parfait morceau du livre. Mais M. Charles Maurras relèvera sévèrement cette inconséquence. Il s’étonnera que M. Barrés parle de l’Italie comme de « l’éternelle éducatrice, et qui continue d’adoucir les jeunes barbares ». Il s’étonnera de même, quelques pages plus loin, que, pour préparer le jeune Philippe à comprendre la vie féodale de la Lorraine, on exalte son imagination par une lecture préalable de l’Arioste. Je crois fâcheux de donner ces habitudes à un jeune garçon qu’on n’a pas « acheté pour qu’il soit internationaliste ». Mais ce sont là des détails, et sur lesquels il faut passer.

L’essentiel, c’est que, pour éveiller en Philippe l’âme française, cette âme faite d’amour, d’honneur et du sentiment de la nature, M. Barres emploie presque exclusivement deux modes d’excitation : l’idée du choix mystique, de la mission divine, représentée par Jeanne de Domrémy et par Bernadette de Lourdes, puis, et surtout, l’idée de la revanche. Le petit Philippe « connaît très sûrement que sa raison de vivre, c’est la revanche », et à cette sûre connaissance l’idée de justice reste d’ailleurs totalement étrangère. Car « c’est quelque chose de dégradant et qui convient proprement aux esclaves, de répéter avec obstination qu’il faut qu’une