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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

Une première lettre de Jacques vint apporter un peu de calme parmi tout ce désordre.

Il lui mandait qu’il était arrivée en Normandie et que son village natal de Rézenlieu-Villodin était en fête à l’occasion de son retour et du mariage de sa sœur. Cependant, malgré le bonheur qu’il avait éprouvé en revoyant des êtres chers, il avait l’impression d’un vide immense autour de lui. Marie-Anna sut par cette lettre que Jacques partageait ses tristesses, ses abattements, ses mêmes espérances :

« Il me manque bien des choses, écrivait-il, depuis que je ne vous vois plus, Marie-Anna ! Tout mon être souffre de la distance qui nous sépare. Mes yeux cherchent partout, des objets qui par vous puissent m’être chers et je ne vois rien. Je ne trouve rien ; j’imagine le néant ! Ma vie n’a de charme que lorsque ma pensée se livre aux délices de votre souvenir ; j’appartiens alors à un monde nouveau ; je ne vois plus que deux beaux yeux qui me regardent, deux bras qui se tendent vers les miens ; je n’entends plus qu’un bruit, le son de votre voix adorable et quand enfiévré jusqu’à la démence, je veux m’élancer et saisir votre apparition, je ne trouve que le vide, je retombe dans un désert, dans mon immense solitude ! Que j’ai besoin de votre vue, mon adorée, pour être heureux ! Quand reprendrons-nous ce beau roman déchiré dès les premières pages ? Dites-moi que vous attendez cela de toute la force de vos espérances ! Dites-moi que vous m’aimez. J’ai besoin de le savoir pour vivre : je sais un mot de vous qui peut illuminer mes nuits et fleu-