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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

rir mon désert. Répétez-le dans toutes vos lettres ce mot, comme je vous l’écris moi-même. J’ai posé mes lèvres sur les deux mots qui suivent : Je t’aime ! »

jacques.

Marie-Anna vit sur l’encre un peu étendue de ces deux mots la trace du passage humide des lèvres. Elle ferma les yeux et posa longuement ses lèvres à l’endroit où Jacques avait posé les siennes. Elle mit la lettre dans son corsage pour l’en sortir aussitôt et la relire cinq ou six fois de suite ; une heure après l’avoir reçue, elle la connaissait par cœur ; habitude chère à tous ceux qui aiment, en général, aux amoureux en particulier. Alors qu’ils pourraient réciter couramment la tendre missive, ils la relisent encore en pensant à ce qui est écrit plus loin, quelquefois même sans plus voir les mots… Qu’importe ! c’est le papier qu’on a touché, regardé, c’est le timbre qu’on a mouillé et collé dans le coin… Le geste recommence dans la pensée, l’absent se rapproche, l’imagination enflamme la mémoire ! c’est toujours le besoin des illusions.

Marie-Anna répondit à Jacques. Elle mit dans sa lettre tout ce que le souvenir gardait en elle de meilleur, de plus aimant. Les lettres de fem-