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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

de ce genre n’ont pas de prises sur les femmes ; quelquefois même elles en rient !… Je te sais trop intelligent et trop bon chrétien pour toucher à ta vie ou briser ta carrière par un geste qui est toujours ridicule. Ne joue pas de ces moyens pour m’obliger à te répondre. Tu me donnerais une mauvaise opinion de toi et j’en serais désolée. Bien qu’il me soit impossible d’encourager le genre d’affection que tu me portes sache que je tiens à conserver l’amitié d’Henri Chesnaye, mon petit camarade d’enfance que j’ai toujours bien aimé depuis quinze ans. Comprends-moi Henri ; on ne commande pas à ses sentiments. Je ne fais qu’obéir aux miens en ne te répondant pas selon ton gré. Suppose donc que nous n’ayons rien dit ; mon silence vaut une réponse.

Il l’écoutait, le cœur en tempête comme on endure un supplice. De pâle qu’il était, il devint rouge, honteux et stupide de son impuissance. Le sang affluait à son cerveau et faisait saillir les veines de ses tempes. Dans le clair-obscur du salon où le soir entrait avec son jeu d’ombre et de nuit, ils formaient un groupe tragiquement découpé : elle raidie dans un coin du sofa, im-