je ne puis les supporter. J’aurai honte à vous dire les persécutions de ce vieux bouc. Oui, c’est aussi sûr que si on me l’avait dit : il a fait son possible pour se débarasser de Mila, qu’il sait bien être mon protecteur, et dont il redoute un traitement, pareil à celui qu’a subi l’Italien. Il fait semblant de vouloir obliger le maire en prenant en main la vengeance de sa fille ; — mais en tout cela le filou ne pense qu’à lui même. Mon père en a peur, et comment pourrais-je aussi confier des choses pareilles à ma mère, elle qui, comme vous le savez, est bien plus souvent au lit que debout. Si j’étais mariée tout en irait bien différemment. Si quelque chose ne me convenait pas je n’aurais qu’à le dire à Mila qui, s’il ne pouvait chasser l’insolent, le regarderait une bonne fois de manière à lui ôter l’envie de jeter encore sur moi un regard malhonnête.
Ah, grand’mère, si je pouvais vous exposer combien nous nous aimons ; mais je ne peux pas même vous le dire. Alors la jeune fille appuya ses coudes sur ses genoux, mit son visage dans ses mains et se tut.
Au même instant Mila entrait à pas silencieux dans le petit jardin, personne ne l’avait encore aperçu. Son beau visage sur lequel se peignait une grande douleur, était comme défait, ses yeux toujours clairs, étaient voilés ; les boucles de cheveux châtains qui encadraient si bien son beau front étaient cette fois coupés ; au lieu de ce bonnet en peau de loutre qui la parait si fièrement, sa tête était couverte d’un bonnet militaire, orné d’une branche de pin. À son aspect Barounka fut saisie de crainte ; les bras de