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Page:Božena Němcová Grand-mère 1880.djvu/403

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Le monde ne remarqua pas les progrès que faisait, en grand’mère, la vieillesse et la maigreur ; mais elle les sentait très bien. Elle disait souvent à Adèle, devenue pour lors une belle et grande fille, et en lui montrant le vieux pommier, qui devenait, d’une année à l’autre toujours plus sec, et n’avait alors presque plus de feuilles : « Nous sommes l’un comme l’autre, et faits pour partir ensemble. » Il arriva qu’un printemps, tous les arbres se couvrirent de verdure, à l’exception du pommier. On dut l’arracher pour en faire du bois de feu. Or, ce printemps là même, grand’mère souffrait d’une forte toux, à ne pouvoir plus faire le chemin de la petite ville et de la petite église du bon Dieu, selon son expression. Ses mains se desséchaient de plus en plus ; ses cheveux devinrent blancs comme neige, et sa voix faiblit toujours davantage.

Un jour madame Thérèse adressa, dans toutes les directions, des lettres qui mandaient tous les enfants. Grand’mère s’était alitée ; elle ne pouvait plus filer. Du moulin, de la vénerie, de l’auberge et aussi de Žernov, c’était plusieurs fois par jour qu’on envoyait demander de ses nouvelles : elle n’allait pas mieux. Adèle faisait des prières avec elle. Elle devait lui rendre compte, tous les matins et tous les soirs, de ce qui se passait au verger, au jardin, et autour de la vache et de la volaille ; lui faire le compte du nombre de jours à s’écouler jusqu’à l’arrivée de M. Beyer. Peut-être, Jean viendra-t-il avec lui, ajoutait-elle chaque fois. La mémoire l’abandonnait. Elle appelait souvent Barounka au lieu d’Adèle, qui lui rappelait alors que Barounka n’était