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Page:Boccace - Le Décaméron (Contes choisis), 1913.djvu/13

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prohiberont à personne, si d’auenture elles l’ont en soy, et quelles y soient tortes et tirées : mais aussi qui en vouldra tirer vtilité et fruict, elles ne le refuseront point : et ne sera iamais quelles soient dictes ou tenues autres que honnestes et prouffitables, si on les list ou temps ou à telles personnes ouquel et pour lesquelles elles ont esté racomptées. Qui aura à dire ses patenostres, ou à faire la tartre à son deuot, qu’il les laisse : elles ne courront après personne pour se faire lire[1]. »

La première traduction française du Décaméron a été achevée en 1414. Elle est l’œuvre d’un clerc champenois appelé Laurent de Premierfait. Cet homme ignorait l’italien, il s’est borné à franciser une version latine du livre des cent nouvelles due à un cordelier d’Arezzo. Traduction d’une version médiocre, le premier Décaméron français fut imprimé de bonne heure et réimprimé. La faveur dont jouit cet ouvrage attira sans doute sur ses imperfections l’attention d’une femme qui contait à merveille et qui voyait en Boccace un maître. Cette princesse de lettres était reine de Navarre, on la nommait aussi la Marguerite des princesses, tant elle était précieuse par le cœur et l’esprit. Anxieuse de procurer à la littérature française une véritable traduction du chef-d’œuvre toscan, la reine de Navarre demanda ce travail à un personnage qui, au dire des Italiens de la cour de France, prononçait la langue de Dante comme s’il eût vu le jour sur les bords de l’Arno. Maître Antoine Le Maçon, dauphinois, avait passé un an à Florence et savait vraiment bien l’italien. Il déclina l’honneur que lui faisait la sœur de François Ier parce qu’il sentait

  1. Le Décaméron : La conclusion finale de l’autheur, trad. Le Maçon (1545).