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Page:Bodin - Les Six Livres de la République, 1576.djvu/60

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40tDELARE PVBLI QJV EAinfi voit-on que la vie des maiftres n eftoit point affeuree,& des efcla-
ues encores moins,& qui euft peu eftre affeuré de fa vie, ny de fes biensYt,t.tfoubs la tyrânie de Sylla,qui onroit quinze ces efcuz à l’homme libre, &^7t liberté à l’efclaue qui aporteroit la tefte d vn banni ? cefte cruauté là co-IpU^n-îibSZUa tinua,iufques ;à ce que les troubles eftâs aucunem et apaifez,après auoir
At^ait mounr f°ixante mil citoyens,il y eut encor vn efclaue, qui aporta latefte de fon feigneur :Sylla l’afranchit,&toft après le fift précipiter. Eta-
lors que lesperfecutionss’echauferefitconueles Chreftiens,il nyauoit
maiftre qui ofàft eftre Chreftien,finon au hazard de fa vie, ou bien qu’il
afranchift fes efclaues.Et fi on dit que la tyrânie ceflànt,la crainte des fei¬
gneurs,& la calumniedesefclauescefle,ôc cependant qu’onfepeutat
fèurer des efclaues :foit- mais auffi la cruauté ôc licece des feigneurs aug-
mete.Et neâtmoins l’eftat des familles ôc des Republiques,eft toufiours
en branle, ôc au hazard de fa ruine, fi les efclaues fe liguent, toutes les hi-
ftoires font pleines des rebellios ôc guerres feruiles.Et quoy que les Ro-
mains fuffent trefgrands ôc tref puiffans,fi eft-ce qu’ils ne peurét empef-
cher que les efclaues ne s’efleuaisët par toutes les villes d’Italie, horfmis*
piurar în Craf- ^ Or°fe ?cn v^e de Meffane : &depuis quelques loix qu’o euft faites,
fi’&pompcij vûa. ils n’en peurét obuiei* qui ne fe Ieuaft ° foixante mil efclaues foubs la co-
kwutte de Spartac,qui vaincut par trois fois les Romains en bataille râgee.£9* “Car il eft bié certain qu’il y auoit pour le moins dix efclaues pour vnhô-
^Latfâ ~ me libre, en quelque pays que ce fuft : corne il eft ayfé à iuger du nobrequi fut leué des habitans d’Athenes, qui fe trôuua pour vne fois de vint
mil citoyens,dix mil eftrangers,& quatre cens mil efclaues. ôc l’Italie vi-
ïtorieufe de tous les peuples en auoit beaucoup plus, ainfi qu’on peut
voir en la harangue de Caffius fenateur : nous auons, dit-il, en noz fa¬
milles diuers peuples, ôc nations en langues, & religions differens ; Et
’ mefines Craflus outre ceux, qu’il employoità fon feruice,en auoit
cinq cens, qui raportoyent tous les iours leur gain des arts ôc fciences
^tuaircs. Milon pour vn iour en afranchit trois cens, affin qu’on neappliquait à la queftion pour depofer du meurtre commis en la
6*^ ? fj ?tperfonne de Claude le Tribun, c’eft pourquoy le Sénat Romain vou¬lant diuerfifier l’habit des efclaues, affin qu’on les peufteognoiftre d’a-
uec les hommeslibres,rvndes plus fages fenateurs remonftra le dan¬
ger qu’il y auroit,fi les efclaues venoyent à ce compter, car bien toft
ils fe fuflent depefcliez des feigneurs pour la facilité de confpirer, ôclc
lignai de leurs habits, auquel danger eft expofee l’Elpagne, ôc la barba¬
rie ou Ion marque les efclaues au vifàge : ce qu’on ne faifoit anciennne-
iniurevocatur ment queaux plus mefchans, ôc qui nepouuoyentiamais* iouirplei-
îibem dedititij .& nement du fruit de liberté, ny du priuileee des citoyens, mais bien onftigmatix Ciccro. ,t.t’ ’ Tt6t/ .in officiis. les marquoit aux bras. C elt pourquoy les Lacedemomens,voyans que
leurs efclaues fe multiplioyent fans comparaifonplus que les citoyens,
ftawhom.fa’dc Pou* 71 efperance de liberté que les maiftres donnoyent à ceux qui plusHt’t‘ falfoyencqu~~* rirZ-r^