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LE SABBAT

du sang gâté, ces mets suppedités par lui, viandes fades et nauséeuses, affligeant l’estomac d’un famélique aboi de mâle faim. Et on se lève de ces tables magnanimes avec plus d’appétit que lorsqu’on vint s’y asseoir. C’est du vent qui gonfle l’intestin, un vent de revanche, qui se vengera du mensonge par la tempête.

Communion des vivants, communion aussi des morts ! ceux-ci sont de la fête ; le sorcier récemment enterré était déterré pour le sabbat. En chœur on processionnait vers les sépultures. À coups de pelles et de pioches, les cadavres exhumés, déliés de leur suaire bénit qui les envoûtait pour le ciel, livraient pour la cuisine ou pour le taudis alchimique leurs entrailles éventrées. Le reste du corps était partagé entre les parents, qui, jaloux de la terre, voulaient à cette chair si proche de la leur, un tombeau parental ; quoi de mieux pour chaud sépulchre que le propre estomac des vivants, surtout s’ils ont faim ? les os mêmes n’étaient pas épargnés ; grâce à une plante basque, appelée balaronna, ils devenaient souples et savoureux autant que navets cuits.


Cependant le sabbat était joyeux quoique funèbre. On y allait comme à des noces, pas seulement pour la grossière licence de s’accointer, mais pour la diabolique communion des âmes. « Le Diable, disait Marie de la Ralde, très belle femme de vingt-huit ans, tenait tellement liés les cœurs et les volontés, sans y laisser entrer d’étranger désir, que je me sentais ravie et croyais être dans quelque paradis terrestre[1]. »

  1. Malgré cet accord des volontés, cette tension des organismes, jamais de miracles bienfaisants, de cure durable au sabbat. L’excitation, vite tombée, donnait seulement aux nerfs une factice souplesse. En fait l’impureté ne produit aucun doux prodige. Il faut le pur visage de la Vierge pour qu’à Lourdes les infirmes soient guéris. Ce mystère aurait dû faire réfléchir M. Zola, n’attribuant les guérisons de Lourdes qu’à l’autosuggestion et au magnétisme des foules.