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LE SORCIER

l’horrible encens de ce sanctuaire ! — le « solide » engagement, le Pacte. Le fumier voilà le vrai, l’efficace laboratoire du sorcier ; là il dépose ce grain de chénevis (écoutez les traditions gardées à Rennes) qui sert à la boulette dont le simple contact à la tête rend chauve et fou.

Pacte souple, pacte ténu, pacte plus sûr dans son modeste ânonnement que les grands pactes signés, avec cette note mirifique : « la minute est en enfer. » (Voir ce sot de Collin de Plancy.) Celui-là est à haute voix prononcé et pas plus. Le Diable inscrit dans sa mémoire le serment ; prudence légitime, dessein louable de rester occulte même en ses engagements solennels. Mais le pacte est prononcé à haute voix afin qu’il ne demeure pas, dans les volutes du cerveau, conspiration obscure, afin qu’il devienne acte réel, formel, décisif, irrévocable. Il peut n’être prononcé qu’une fois et sa formule dépend des circonstances, des besoins ; car ce pacte est précis : tant pour tant, ceci pour cela… Il est parfois utile, lorsque la gravité de l’affaire tourmente le sorcier, de le réitérer neuf fois, ce vœu exécré. Neuf fois, nombre sacré dans les vieux Temples, comme dans les églises du Christ où les neuvaines sont accomplies, et encore dans la sombre et désespérée synagogue du Très-Bas. Serait-ce une prise à témoin des neuf hiérarchies diaboliques ? ou plutôt pour le sorcier une sorte d’auto-suggestion idoine à l’imprégner mieux de son propre vouloir, à augmenter sa foi pour accroître sa puissance.

    en porte claudicant sur ses trois pieds, dont un noueux bâton. En retour de l’aumône, le sou simple ou double, la miche de pain dur, la bolée de cidre, les restes d’une compacte soupe dont le chien de garde n’a sans doute pas voulu, suppliée et arrachée par cette voix où l’on pressent la colère sous l’humiliation, il livre quelques bribes du mystère, renseigne sur l’inconnu. Sorcier, non pas, — mais somnambule. (Il en rôde près de la chapelle espagnole de l’avenue Friedland, au coin de la rue Lamennais.)