Page:Boissière - Propos d’un intoxiqué, 1909.djvu/75

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bientôt, sous l’empire des “ sensations perfides et douces ”, le vieil “ à quoi bon ? ” viendra souffler à son oreille ses pires sophismes que vous aimerez, pauvre artiste, pour leur séduisante originalité. Déjà la conscience de l’inutilité de l’œuvre, comme de toutes choses, ne vous désespère plus ; un traître optimisme vous envahit tout entier ; vous oubliez que le travail intelligent portait en lui sa récompense ; encore deux ans, et vous renierez jusqu’aux plaisirs, pourtant bien passifs et bien peu fatigants, du dilettante ; vous jouirez des heures brèves, des jours coupés de bons repas, de lampées fraîches, et vous descendrez à la vie heureuse du végétal. Bien rares ! ceux qui tiennent âprement leur volonté à deux mains, qui gardent leur quant-à-soi au milieu des niaises discussions et des plaisanteries surannées, qui réservent le meilleur de leur cœur et de leur pensée pour les heures de l’étude solitaire, et s’astreignent à rester étrangers parmi tous les hommes.


S. . . , février 1889.


Un petit poste de la haute Rivière-Claire, un de ces postes perdus dans d’immenses régions dévastées, sur un mamelon isolé au milieu