Page:Boissier - Cicéron et ses amis.djvu/106

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Terentia appartenait à une famille distinguée et riche. Elle lui apportait en dot, selon Plutarque[1], 120,000 drachmes (111,000 francs), et nous voyons que de plus elle possédait des maisons à Rome et une forêt près de Tusculum[2]. C’était un mariage avantageux pour un jeune homme qui débutait dans la vie politique avec plus de talent que de fortune. La correspondance de Cicéron ne donne pas une très bonne idée de Terentia. Nous nous la figurons comme une femme de ménage économe et rangée, mais aigre et désagréable. La vie était difficile avec elle. Elle s’entendait peu avec son beau-frère Quintus et encore moins avec Pomponia, sa belle-sœur, qui, du reste, ne s’entendait avec personne. Elle avait sur son mari cette influence que prend toujours une femme volontaire et obstinée sur un esprit irrésolu et indifférent. Cicéron la laissa longtemps maîtresse absolue dans son ménage ; il était bien aise de se décharger sur quelqu’un de ces occupations qui ne lui convenaient pas. Elle ne fut pas sans avoir quelque action sur sa vie politique. Elle lui conseilla des mesures énergiques à l’époque du grand consulat, et plus tard elle le brouilla avec Clodius en haine de Clodia, qu’elle soupçonnait de vouloir lui plaire. Comme tous les profits lui étaient bons, elle parvint à l’engager dans quelques affaires de finance qu’Atticus lui-même, qui n’était pourtant pas scrupuleux, ne trouvait pas très honnêtes ; mais là s’arrêtait son pouvoir. Il semble qu’elle demeura étrangère et peut-être indifférente à la gloire littéraire de son mari. Dans aucun des beaux ouvrages de Cicéron, où le nom de sa fille, de son frère et de son fils reviennent si fréquemment, il n’est question de sa femme. Terentia n’eut point d’influence sur son esprit. Il ne lui confia jamais sa pensée intime sur les choses

  1. Plutarque, Cicéron, 8.
  2. Ad. Att., II, 1.