Page:Boissier - Cicéron et ses amis.djvu/232

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importe, pour se faire de lui une idée juste, d’interroger ceux qui ont pu le connaître. Quoique Cicéron ait été presque toute sa vie séparé de César par des dissentiments graves, deux fois il eut l’occasion d’entretenir avec lui des relations intimes : pendant la guerre des Gaules, il fut son allié politique et son correspondant assidu ; après Pharsale, il redevint son ami et se fit l’intermédiaire entre le vainqueur et ceux qu’il avait condamnés à l’exil. Cherchons ce qu’il nous dit de lui à ces deux moments de sa vie où il l’a vu de plus près, et recueillons dans sa correspondance, qui nous fait si bien connaître les hommes importants de cette époque, les renseignements qu’elle contient sur celui qui fut le plus grand de tous.

I

Il faut d’abord que je rappelle par quels événements Cicéron fut amené à déserter le parti aristocratique, auquel il s’était attaché depuis sont consulat, pour servir la fortune des triumvirs, et comment l’ami courageux d’Hortensius et de Caton devint le complaisant de Pompée et de César. Ce n’est pas une belle époque de sa vie, et ses admirateurs les plus résolus la dissimulent le plus qu’ils le peuvent. Cependant il y a quelque intérêt, peut-être même quelque profit, à s’y arrêter un moment.

Quand Cicéron revint de l’exil auquel Clodius l’avait fait condamner après son consulat, son retour fut un véritable triomphe. Brindes, où il débarqua, célébra son arrivée par des fêtes publiques. Tous les citoyens des municipes qui bordaient la voie Appienne l’attendaient sur la route, et il arrivait de toutes les fermes voisines des pères de famille avec leurs femmes et leurs enfants pour le voir passer. À Rome, il fut reçu par une multi-