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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

André à madame de Vineuil.
Sous Laval, 17 janvier.

Cela va moins mal, ma chère maman. Il y a deux jours, nous avons eu à Saint-Jean-sur-Erve un combat honorable. L’artillerie y a joué le principal rôle ; heureux sommes-nous de l’avoir sauvée ! elle nous l’a bien rendu.

Notre 16me corps me semble avoir eu l’honneur des principales attentions de messieurs les Allemands, il a fallu se battre tous les jours jusqu’à hier. À peine pouvait-on leur opposer un rideau de troupes tenant ensemble pour masquer l’effroyable mêlée qui ondulait en arrière, et pourtant nous n’avons perdu un ni canon ni un caisson ; je ne parle pas des hommes ; certains bataillons sont comme fondus, qu’en retrouvera-t-on ? Personne ne le sait. La cavalerie allemande a dû ramasser des milliers de pauvres misérables aussi écloppés au moral qu’au physique, la majeure partie du reste forme la masse confuse que par politesse on appelle encore l’armée. Il y a peu de tués, davantage de blessés et de malades qui vont très-probablement mourir, parce qu’il n’y a plus rien d’organisé pour eux. Je suis toujours et complètement