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Le doux son de sa voix et ses regards vainqueurs
Sont d’accord pour porter l’amour au fond des cœurs.
La nature a tout fait pour cette fille heureuse,
Et ne s’est point montrée à moitié généreuse.
Votre amante, baron, n’a que les seuls dehors :
La mienne réunit seule tous les trésors.
Ses yeux et son souris, où règne la finesse,
Annoncent de l’esprit et tiennent leur promesse ;
Elle parle fort peu, mais pense infiniment :
À l’égard de son cœur, c’est le pur sentiment,
Il s’attache, il est fait exprès pour la tendresse,
Et pétri par les mains de la délicatesse.

Le Baron.

Vous en parlez trop bien pour n’être pas aimé.

Le Marquis.

Oui, je crois l’être autant que je suis enflammé.

Le Baron.

Vous êtes trop heureux, et je vous porte envie.

Le Marquis.

Attendez, mon histoire encor n’est pas finie ;
Vous ignorez le point critique et capital.
Obligé d’entreprendre un voyage fatal,
J’ai perdu malgré moi ma maîtresse de vue ;
Je ne sais, qui plus est, ce qu’elle est devenue.
Nous nous sommes écrit d’abord exactement,
Et ses lettres suivaient les miennes promptement ;
Mais elle a tout à coup cessé de me répondre.
J’ai pressé mon retour ; je suis parti de Londre ;
Et mes feux empressés, d’abord en arrivant,
M’ont fait, pour la revoir, voler à son couvent.