Page:Boissy-Oeuvres de Théâtre de M. Boissy. Vol.2-1773.djvu/165

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle hait la campagne, & chérit le plaisir.

CHAMPAGNE.

Son Pere ?

LISETTE.

Son Pere ? C’est un homme étrange à définir.
Il étoit autrefois prévenant, doux, affable.
Il est présentement noir, brusque, inabordable ;
Je ne sai quel démon lui travaille l’esprit ;
Mais depuis quatre mois, tous les jours il maigrit.
Sa sœur n’y conçoit rien, & du mal qui le mine
Les Médecins eux-mêmes ignorent l’origine.
Il est vrai qu’en province ils sont très-ignorans.
Et Madame tout haut s’en plaint depuis long-tems.
Vive ceux de Paris, dont je l’entens sans cesse
Vanter le grand savoir avec la politesse.

CHAMPAGNE.

Oui, vraiment, ces Messieurs sont jolis maintenant !
S’ils dépêchent le monde, oh ! c’est en badinant.
Je ne m’étonne plus que tout Paris en use.
Leur art tue, il est vrai ; mais leur jargon amuse.
J’entrevois cependant, sans être Médecin,
Ce qui peut de ton maître exciter le chagrin.
Plusieurs Procès perdus ont épuisé sa bourse ;
Et voilà de son mal la véritable source.

LISETTE.

En ce cas, son état n’est pas désespéré.
Par son ami Cléon il sera réparé.
Aux Indes il a fait une fortune immense.
Il est même en chemin pour revenir en France.

CHAMPAGNE.

J’entends du bruit, on ouvre, & j’en frémis d’effroi.

LISETTE.

Ah ! C’est Monsieur qui vient, je tremble plus que toi.

CHAMPAGNE.

Où me cacher ! Où fuir !