Aller au contenu

Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 97 )

ritez rirez peu ce que j’avois projetté pour votre bonheur. Perſonne n’auroit pu prévoir le caprice inconcevable qui vous porte à rebuter l’homme du monde le moins fait pour éprouver un pareil ſort : quelle qu’en ſoit la cauſe, j’allois vous en punir, en exigeant de vous la plus prompte, la plus parfaite obéiſſance… M. de Murville m’a retenue… Trop délicat pour vouloir vous obtenir de la ſeule autorité, il m’a ſuppliée de reprendre ma parole, de vous tranquilliſer aux dépens de ſon amour, de ſes eſpérances… J’ai conſenti : vous ne l’épouſerez point. Mais comme j’ai réſolu de vous marier inceſſamment, j’ai fixé mes vues ſur M. le Préſident de Grandelle, qui vous fait l’honneur de vous demander. Il viendra demain recevoir ma réponſe ; elle ſera déciſive, & je vous enjoins de vous conduire ſi bien avec lui, qu’il n’ait pas ſujet de ſe plaindre.

Il faudroit l’avoir connu, ce faſtidieux Préſident, pour ſe faire une idée de ce que je fentis à cette nouvelle. C’étoit un de ces gens à qui leur état donnoit le privilege d’ennuyer impunément. Son âge de cinquante ans étoit ſon moindre défaut, pour une femme du mien. Je ne l’aurois pas trouvé ſoutenable à vingt-cinq.

Saiſie d’épouvante & de douleur, je me précipitai à genoux, en criant : Ma mere !