Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/104

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treſſe de choiſir entre Mrs. de Murville & de Grandelle… Hâtez-vous de prononcer pour l’un ou pour l’autre ; au-delà de cet inſtant, il feroit trop tard… Je vous défends de me dire un mot, s’il ne va pas au but que je vous propoſe. L’alternative étoit cruelle ; cependant il y avoit une ſi prodigieuſe différence entre les deux perſonnages, que la penſée d’être au Chevalier, plutôt qu’à ſon concurrent, me fit trouver ma deſtinée moins affreuſe. J’éludai. Je tergiverſai… Mon cœur ſentoit quelques déchirements… La Marquiſe preſſoit, s’irritoit… Il falloit parler… Je baiſſai les yeux,… j’étouffai des ſoupirs, & décidai à demi-voix en faveur du Chevalier.

Quel effort de courage ! dit Madame de Rozane, en hauſſant les épaules. Reſte à ſavoir ſi M. de Murville aura la généroſité d’oublier vos incartades ? C’eſt ce que nous allons apprendre.

Elle ſonna. Je courus près d’une fenêtre pour dérober la vue de mes pleurs ; & mon trouble devint exceſſif, quand j’entendis l’ordre d’avertir Murville au moment même.

Son apparition fut ſi ſubite, que je le ſoupçonnai de s’être tenu pendant la converſation dans le cabinet, d’où l’on pouvoit ſortir par une porte de dégagement.

Ma fille vous rend enfin juſtice, lui dit