Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/122

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Mon humeur étoit dans ſon naturel ; mon ame, ſinon contente, du moins aſſez tranquille ; j’étois redevenue fraîche & jolie quand Murville arriva.

Sa préſence ne me ſurprit point, je l’attendois… Elle me fit pourtant une étonnante révolution… Mes ſentimems étoient ſi tumultueux, ſi variés, qu’il me ſeroit impoſſible de les définir… Il y avoit de tout ; & je fus heureuſe de ce que la circonſtance favoriſoit mon déſordre. Notre union fut célébrée par une Paſtorale ingénieuſe, dont on m’avoit caché les préparatifs. J’admirai tout, parce que tout y parloit de moi. Cette fête n’étoit que le prélude de celles qui m’attendoient à Paris.

Le jour de notre retour en cette ville, fut celui des étonnements. Nous n’arrivâmes qu’aux flambeaux. Je comptois aller chez ma mere, & crus tomber des nues en entrant dans une maiſon très-belle, & très-agréablement décorée, qu’on me dit être la mienne. Introduite dans un ſallon où tout reſpiroit la galanterie & la magnificence, j’y trouvai quatre-vingt perſonnes de ma famille, de mes connoiſſances, parées comme en un jour de noce. Revenue de l’étourdiſſement qu’une telle apparition m’avoit cauſé, je me ſentis un peu confuſe de paroître au milieu de ce cercle dans un très-ſimple